jeudi 16 février 2012

Le bonheur est dans la crise



J'ai bientôt la quarantaine.

Les anglais parlent de la quarantaine avec une expression assez significative : "Over the hill", littéralement : "de l'autre côté de la colline". 
La colline est montée, va falloir songer à la redescendre.  
Forcément j'arrive en quelque sorte à la moitié de ma vie comme si après avoir gravis l'équivalent des 117 mètres de la Dune duPyla à pied ( essayez sans passer par les escaliers, je peux vous assurer que ça vaut bien quelques douleurs de ses quarante premières années ! ) vous la redescendez à pied, également, et là vous avez plusieurs choix :

  • L'escalier consciencieux avec plusieurs paliers où l'on peut s'arrêter faire une petite pause.
  • Les grandes enjambées dans le sable version "j'me la donne un peu quand même !"
  • Ou se laisser rouler à toute vitesse comme une grosse pierre qui irait se dégommer sur le premier pin parasol venu !
Me voilà donc à quelques mois de bientôt redescendre cette foutue colline et l'heure est venue de tirer certains petits bilans de mon existence, si courte et futile soit-elle.

A quarante ans, on ressemble enfin à une personne respectable. J'entends par respectable le fait qu'on ne se choppe plus cette sorte de mouvement "anti-jeune" qu'il m'est souvent arrivé de ressentir, qu'il s'agisse de passer pour la petite jeune inculte au sein de son taff ( ben oui forcément j'ai 23 ans, je connais rien à la vie, donc c'est pareil pour le travail ) ou dans une agence immobilière ( ben oui grosse truffe, j'ai 25 ans, je vais pas payer mon loyer et faire des soirées mousses tous les soirs ! Je suis JEUUU-NEUUUU ! ). Ou à la sortie des magasins quand un truc sonne par inadvertance ( Ben oui pauvre bulot de vigile, je suis jeune, jeune = voleuse).  

La semaine dernière, je sortais des Galeries Lafayette où je venais d'acheter mon parfum, emballé dans un sac accompagné de son ticket de caisse. C'est alors que les portiques antivols de sortie se mirent à vociférer la traditionnelle sonnerie " regardezzz c'est elle la voleuuuuse !! Houuuuuuuuu ". Dans un cas comme celui ci où le commun des mortels aurait tendance à se barrer sans demander son reste en se fondant dans la masse extérieure des badauds, un de mes réflexes réguliers est de regarder mon sac pour vérifier qu'un boulet mal intentionné ne m'a pas collé un truc qui ne m'appartient pas pour me faire porter le chapeau ( parano moi ? non?!) tout en profitant de sortir en même temps que moi.

Me voici donc la tête plongée dans mon sac en papier rouge quand un Monsieur s'approche de moi et lorsque je lui tends mon sac, me demande très gentiment "Madaaaaame ? vous devez avoir l'antivol qui ne s'est pas démagnétisé, souhaitez vous que je l'enlève du parfum pour que vous ne sonniez pas aux autres portiques des autres magasins des GL ?".

Bon alors là on nageait dans du grand délire. A dix mètres de moi, des petites nanas un peu girly qui visiblement venaient aussi de déclencher un autre portique, étaient en train d'ouvrir leurs Eastpack en long, large et travers.

Je tendais donc le flacon de patchouli au vigile qui, muni d'un cutter, dégomma une petite pastille coté emballage plastique, et me rendit mon paquet. Je quittai le magasin non sans avoir reçu les formules de politesse habituelles : "excusez nous pour ce désagrément et passez une bonne journée". Bon ...

A quarante ans on commence à s'intéresser de plus près aux pubs

  • qui parlent de douleurs aux articulations.
  • qui parlent de retraite complémentaire
  • qui intègrent ( peu importe le produit ) n'importe quelle notion de CONFORT !

A quarante ans, on sait que si on a jamais kiffé le sport, ben c'est un peu tard pour s'y mettre. (NON NON NON, que les sportifs qui lisent ce billet ne tentent pas de me dire "pfff, le sport, c'est à tout âge" FAUX ! Le sport à 40 ans c'est tout beurk !)

A quarante ans on peut se la péter "j'ai de l'expérience" et appeler les petits cons de 23 ans "jeune homme". Spécifiquement quand vous avez à faire à l' un de ces spécimens derrière un guichet de la sécu, de la poste, de votre banque ou de tout autre organisme qui aurait tendance à vous faire monter la tension à plus de 18. C'est aussi valable avec le "Jeune fille", mais dans ce cas là, essayez de rester neutre dans la prononciation. Ce n'est pas parce qu'elles sont nées après 1980 qu'il faut être désagréable !

A quarante ans, on a du mal avec les grass mat'. D'ailleurs, si mes souvenirs sont bons, je crois que ma dernière grass mat' remonte à une douzaine d'année.

A quarante ans, on fait son tri. On passe beaucoup de temps à faire du tri. Probablement parce qu'il n'est plus question de s'alourdir le quotidien avec des choses inutiles. On essaye de distiller une dose suffisante de perfectionnisme et de constance pour que ce tri soit efficace et durable. Mais l'avantage est que si l'on se fait rattraper bien souvent par le "trop plein", il se produit alors  une sorte de phénomène d'équilibrage. Une homéostasie psychologique et domestique.  Plus besoin du superflu. Ou seulement si c'est moi qui le décide.

A quarante ans on est dans une grosse crise d'adolescence :

  • sans bouton,
  • sans petit con pour draguer votre meilleure amie,
  • sans risque d'arrivée massive de cellulite sur les cuisses ( elle est déjà installée depuis belle lurette ),
  • sans galère pour savoir qui va vous raccompagner à la fin de la soirée,
  • sans âme charitable pour vous tenir les cheveux au dessus des toilettes après une soirée arrosée (accessoire Kestufousdanstonsac : pinces à cheveux très pratiques chez H&M, 1,90 € les deux).
  • sans chercher forcément une approbation dans tout ce que l'on décide de faire
  • sans rébellion (la rébellion, c'est fatiguant à la longue, et ça se transforme en cynisme vers la trentecinquaine, et c'est ça qui en devient meilleur !)
  • et ... sans complexes ( plus le temps des complexes, m'en fout des complexes ... Non mais sans déconner, j'ai déjà pas le temps de trier mon dressing, est ce que je vais en plus me faire chier à avoir des complexes ? Ca virerait limite maso là non ? ).
A quarante ans, si on sait pas forcément ce qu'on veut, on sait surtout ce qu'on ne veut plus.

Bon, on va déjà essayer de la redescendre sans trop se casser la gueule cette colline ( Pardon Mamounette, promis j'essaye de plus dire de gros mots sur mon blog !! ).

#laviedevantmoi

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